Sri Aurobindo
Il accompagné de façon "très proche", certains disciples qui ont atteint une grande réalisation, mais qui sont restés inconnus du grand public. Il fut par cela et par sa connaissance des differents yogas, un vrai maitre en Atma yoga.
"Le Divin ne s'offre qu'à ceux qui s'offrent eux-mêmes à la Divinité." (Sri Aurobindo)
Entre la nature matérielle et le Divin sous ses divers aspects, entre l'Absolu et l'âme individuelle, entre l'unité et la multiplicité, Sri Aurobindo perçoit une continuité dans une parfaite harmonie.
Ainsi les oppositions entre l'Absolu et le Relatif, l'Esprit et la Matière, la Vie et la Mort, la Connaissance et l'Ignorance, correspondent en fait à des visions d'une même réalité sur (les plans différents et sous les éclairages différents ou à des stades différents de manifestation.
Pour Shrî Aurobindo selon la conception traditionnelle hindoue, il y a « l’origine » non-temporelle du monde, l’Absolu non-différencié (Nirguna Brahman) et Sa Puissance de manifestation, Mâyâ, Shakti, qui, pour lui, n'est autre que Son aspect dynamique, Sa « force d'être qui manifeste son propre pouvoir en action ». C'est pourquoi, comme la Bhagavad-Gitâ, il admet, coiffant celle dualité première, au-dessus de l'Absolu et de la manifestation « à la fois au-delà de l'unité et de la multiplicité », une entité primordiale, le Purushottama à la fois un et multiple, actif et non-actif, à la fois Être et Devenir.
Il envisage la création un peu comme le font les chrétiens. Nous sommes les participants de l'évolution d'une creation dont le mobile est la Félicité suprême, l'Ananda.
Ainsi "Toute la vie est un yoga." Nous retrouvons là un principe essentiel de l'Atma yoga!
Shri Aurobindo attend de ses disciples connus ou inconnus, présents et à venir, qu'ils apportent leur contribution à cette évolution, c'est-à-dire, à la descente du Supramental dans notre monde. A cette fin, il a pendant de longues années entretenu avec ses disciples une correspondance volumineuse dans laquelle il donne des instructions. Celles-ci sont tantôt générales, tantôt destinées à un disciple donné à un moment donné. Ces instructions varient en effet selon les circonstances. Cependant le but reste le même et la ligne générale comporte des éléments permanents, essentiellement de s'ouvrir à la Mère Divine pour qu'elle descende en nous et nous permette ainsi d'orienter et d'accélérer notre évolution. Mais aussi de combiner la vie active et la vie contemplative : « Le fait de rechercher, et éventuellement d'atteindre une vision de moi du monde différente de celle dans laquelle nous agissons actuellement n'est ni une raison, ni une excuse pour nous abstenir d'agir. »
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Nous voulons également montrer le caractère original de la philosophie de Sri Aurobindo. Il n'acceptait pas la théorie de mâyâvâda, exposée par Shankara, et refusait de voir une dichotomie irréductible entre le pourousha et la prakriti - l'âme et la nature - du système samkhien. Pour avoir la vision de Brahman il n'est pas nécessaire de nier prakriti ou mâyâ. Mais la nature inférieure doit être purifiée, elle doit manifester la lumière, la paix, la félicité et l'harmonie de la nature divine. Sri Aurobindo affirme que si la théorie de mâyâ est poussée à l'extrême, cette théorie elle-même devient illusoire; la vie est donc vraie, et n'est pas mâyâ ; elle est divinement vraie, vraie d'une réalité féconde. Pour arriver à cette compréhension, l'homme doit entreprendre une discipline de purification dont les effets modifieront le corps autant que le mental.
Dans son livre La Synthèse des Yoga, Sri Aurobindo décrit les différentes étapes de cette purification. Chez la plupart des hommes, le mental est dépourvu de l'intuition du Divin, il est attiré vers le grossier; Sri Aurobindo a montré comment les matérialistes ont cependant déifié ce "mental physique" ; ils ont rêvé de trouver sur le plan vital une égalité qui effacera toute distinction, qui établira l'unité. Cet idéal va à l'encontre de la culture ancienne de l'Inde. L'aspect physique doit manifester également la conscience infinie et spirituelle.
Le caractère du yoga intégral de Sri Aurobindo s'exprime par la synthèse de karma, bhakti et jnâna - l'action, la dévotion et la connaissance. La libération de l'homme doit s'accompagner de la libération de la nature. Le Suprême purifiera, en s'y intégrant, tous les plans de la conscience. Il y aura ascension de l'inconscient vers le supraconscient, et descente du supraconscient dans la matière. Selon Sri Aurobindo, la perfection et la nature divine sont identiques ; cette perfection inclut celles du corps, de la force vitale (prâna) et de l'intelligence (bouddhi). L'homme purifié devient alors le véhicule de la volonté divine; il est l'expression même du Suprême.
La disparition de Sri Aurobindo, survenue le 5 décembre 1950, est trop récente pour qu'il soit possible d'estimer et d'apprécier sa prodigieuse contribution à la renaissance de l'Inde. Il sera toujours considéré, vénéré comme l'un des plus grands penseurs des temps modernes, et aussi comme un homme dont la sainteté et la sagesse ont resplendi avec un remarquable éclat.
Avant de conclure, considérons l'attrait qu'exerce, sur l'esprit occidental, la pensée de Sri Aurobindo. Au cours des dix-huit dernières années que j'ai passées en Europe, j'ai rencontré de nombreuses personnes pour qui les écrits de Sri Aurobindo sont plus accessibles que ceux des autres penseurs de l'Inde moderne. Pourquoi ? Parce que Sri Aurobindo avait été élevé, éduqué en Europe, et avait découvert l'Inde après avoir été exilé pendant quatorze ans de son pays natal. L'Inde dont nous parlons n'est pas l'Inde nationale. C'est les pays où sont cachés les secrets de l'âme partout où l'on redécouvre ces trésors spirituels, l'INDE est vivante. Le poète Tagore a fort bien exprimé qu'elle n'était pas limitée par des frontières géographiques. Lorsqu'un homme qui a vécu dans le monde des réalités éphémères vient en contact avec les couches plus profondes du monde spirituel, il découvre son âme, comme Sri Aurobindo l'a découverte. Il ne s'agit pas de spiritualité hindoue, mais purement et simplement de spiritualité.
C'est pour cette raison que l'Européen trouve dans les écrits de Sri Aurobindo un langage qu'il peut comprendre. Après avoir acquis une connaissance intime de la civilisation occidentale jusque dans ses racines les plus profondes, après s'être imprégné des humanités grecque et latine, Sri Aurobindo a interprété pour nous le message philosophique et spirituel de l'Inde éternelle, cette Inde si ancienne et cependant toujours jeune.
Voici donc un homme qui peut engager avec l'Occident un dialogue, et non un monologue. Car il appartient à chacune des deux civilisations, il est remonté jusqu'à leurs sources. Il est la force prestigieuse qui relie l'Orient à l'Occident.
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